Nyamulagira (séismes)

«Le tam-tam africain avait fonctionné, comme toujours sans qu'on l'entendît ou qu'on pût en imaginer les relais ; quand ils arrivèrent à Nyamitaba devant l'esplanade que dominait le rugo du chef mututsi, ce dernier et sa suite étaient plantés entre le seuil de l'enceinte et l'auge du bétail, majestueux dans leurs longs péplums clairs, chacun, coude plié, main à hauteur de l'épaule tenant une lance posée de biais, Bigirumpatsé en avant-plan. Sylvain s'engagea sur la terre battue et stoppa sa moto à quelques pas du comité d'accueil. Dès qu'il retira ses carreaux, son impression se mua en certitude : les lèvres du chef étaient si serrées qu'elles ne formaient plus qu'un trait, tandis qu'à son instar ses compagnons faisaient grise mine aux arrivants.

- C'est à moi qu'il en a, murmura Charistie sans desserrer les dents. Méfie-toi quand il est en colère.»

Nyamulagira (3,056m), situé sur la terre de Masisi, est le plus occidental des huit volcans de la chaîne des Virunga. Le seul à être actif avec son voisin, le Nyaragongo. Ses éruptions les plus importantes se produisirent en 1912, 1938 et 1948.

«Nyamulagira» est la suite de «Usubui», dans lequel, en emboîtant le pas à Sylvain Guillaume, administrateur territorial, nous découvrions la région des Grands Lacs au début de la deuxième guerre mondiale. Nous le retrouvons sur son parcours professionnel et affectif, tantôt en butte au monde qui l'entoure, tantôt en porte-à-faux par rapport à la marche inexorable de l'histoire. Aurait-il pu prévoir à l'analyse des tensions d'alors que c'est sur «son» territoire qu'aurait lieu en 1993 une guerre sanglante entre ethnies qui, tel un nouveau séisme, gigantesque et sans fin, s'étendrait sur l'Afrique centrale ? Les notes en fin de volume apportent un éclairage historique à ce roman déjà plein de véracité...